19 mars 2021

#ENTRETIEN. Josua TUISOVA : « Je préfère faire la passe et faire marquer mes coéquipiers »

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Né à Votua au nord de l’île principale de l’archipel des Fidji en 1994, « Josh » rencontre le rugby à l’âge de 9 ans, à l’école. Un simple jeu d’enfant qui devient un destin.
Je jouais au rugby à l’école, mais j’ai arrêté mes études en 2010 car je n’étais pas un très bon élève. J’ai continué à jouer au rugby avec des amis et des cousins. Un jour, un instituteur est venu voir un de nos matchs et m’a demandé si je voulais intégrer l’équipe de son établissement. Je suis donc revenu à l’école pour jouer avec l’équipe universitaire. Depuis, je continue de jouer au rugby.
 
À cette époque, un joueur compte particulièrement pour lui.
Avant de commencer à jouer au rugby, j’aimais suivre un joueur fidjien en particulier, 
Vereniki Goneva (aujourd'hui, joueur de Mont-de-Marsan). Je le regardais quand il jouait avec mon frère pour les Fidji en équipe nationale de rugby à 7.
 
Puis, très vite, il est repéré par le RCT et rejoint la France. Une étape importante pour le joueur, mais également pour l’homme.
Je suis arrivé à Toulon en 2013, j’avais 19 ans. C’était dur pour moi, car c’était la première fois que je quittais ma famille et que je partais loin de mon pays.
 
Une véritable communauté fidjienne se retrouve en France, un repère de l’autre côté de la planète.
Nous avons plusieurs communautés fidjiennes dans différents endroits en France. On essaie de se rassembler notamment pour le « Fidji Day » (fête nationale, le 10 octobre). J’ai un petit groupe d’amis fidjiens avec lequel j’essaie de rester régulièrement en contact, notamment un joueur de Bourgoin avec qui j’étais à l’école aux Fidji ou d’autres joueurs qui évoluent en Fédérale. (…) J’essaie toujours d’aider et d’être présent quand je vois qu’ils en ont besoin, même en dehors du rugby. J’essaie de leur offri
r des équipements (crampons par exemple), de leur donner des conseils et le soutien dont ils ont besoin.
 
Un lien particulier qui a beaucoup compté dans l’arrivée du jeune Temo Mayanavanua à Lyon…
Avant de signer son contrat, il est venu m'en parler en novembre, quand on était en équipe nationale. Il m’a demandé comment était le club et comment étaient les gens à Lyon. J'ai répondu à tout ce dont il avait besoin de savoir. Je lui ai aussi dit que je serais là pour lui, qu’il vienne à Lyon ou qu’il signe dans un autre club. Finalement, il est venu ici et nous essayons de rester proche. Je lui dis souvent de venir à la maison, car je n’ai pas envie qu’il reste seul dans son appartement.
 
Une culture fidjienne importante dans son quotidien.
J’adore les chansons de gospel fidjien. J’en écoute avant chaque match. (…) Ma femme adore cuisiner et moi j’adore manger (sourire). Nous mangeons principalement de la cuisine fidjienne avec le Taro, du manioc, des currys, du chop suey etc. Mais je ne mange pas de Taro toutes les semaines, c’est très consistant. J’en mange uniquement le week-end, après les matchs. Nous cuisinons aussi de plus en plus de nourriture française en regardant sur YouTube. J’adore les pâtes ! Si je ne mange pas de cuisine fidjien
ne, je mange des pâtes (sourire). 
 
Une intégration en France progressive et une arrivée à Lyon épanouissante.  
Je me suis habitué à la vie en France, et venir à Lyon a été plus facile, notamment parce que j’ai ma famille qui me suit et vit avec moi. (…) J’avais déjà joué avec beaucoup de joueurs et je connaissais déjà Pierre (Mignoni). Quand je suis arrivé à Toulon en 2013, il était déjà là. (…) Aujourd’hui, je me sens bien. Je suis content jouer avec le LOU.
 
Ses premiers mois à Lyon ont été chahutés par évènement forts...
Malheureusement, je n’ai pas eu beaucoup de temps pour bien visiter la ville de Lyon à cause de la situation sanitaire, mais j’aime bien emmener ma famille à Fourvière, visiter la basilique et voir la ville (…)
 
Et puis, la rencontre avec la neige !
Je n’avais jamais vu la neige ! À Toulon, il n’y avait que le soleil. C’était dur pour moi de conduire par exemple.
 
 
Difficile de parler rugby avec Josua Tuisova sans s’attarder sur le rugby à 7.
Mon meilleur souvenir ? Jouer les Jeux Olympiques en 2016 (Rio), avec la sélection à 7 des Fidji. Il y a beaucoup de fidjiens dans le monde qui aurait aimé être à ma place. J’étais tellement heureux quand le coach est venu me voir à Toulon pour m’annoncer que j’étais sélectionné.

Un souvenir fort, dont il revient Champion Olympique !
Le jour où on est revenu aux Fidji, l’aéroport était plein ! Nous avons fait la fête toute la journée. Ce jour est maintenant devenu, chaque année, un jour de fête aux Fidji. (…) On n’avait pas de billet de sept dollars, ils ont donc décidé d’en créer un, à notre effigie, suite à notre victoire.
 
Entre le 7 et le 15, une évolution dans sa carrière
Avant je préférais le 7, car c’est comme ça que j’ai commencé à jouer, mais maintenant je me suis habitué au 15. C’est plus dur de retourner au 7 quand tu joues au 15 depuis longtemps.
 
La prochaine Coupe du Monde de Rugby à 15, un objectif particulier
J’espère être sélectionné pour cette Coupe du Monde car c’est en France… et j’ai envie de rejouer les mêmes équipes qu’en 2019 (Australie, Pays de Galles) et de prendre notre revanche ! (…) Mais j’essaie de ne pas regarder trop loin dans l’avenir. Je prends saison après saison. Aujourd’hui, je me concentre sur la fin de saison du LOU.
 
Un épanouissement de l’homme important pour le joueur.
Je vois le rugby comme un sport qui rassemble, qui permet de faire énormément de rencontre et de créer des liens avec des gens.
 
Un style de jeu bien à lui, entre puissance et générosité…
J’essaie juste de ne jamais sous-estimer mes adversaires car je sais qu’on joue contre des équipes très fortes tous les week-ends. J’essaie de jouer mon jeu et d’utiliser mes qualités tout en restant humble (…) Je préfère faire la passe et faire marquer mes coéquipiers.
 
… mais également les mollets les plus célèbres du TOP 14 !
Il y a même un gars qui est venu pour mesurer mes mollets (pour un reportage) ! Je n’aime pas du tout qu’on parle de ça (sourire) !

 
Mathieu Bastareaud, un coéquipier particulier qui l’avait vu arriver à Toulon avant de rejoindre ensemble le LOU Rugby.

« On l’a d’abord vu jouer avec les espoirs mais tout le monde s’est vite rendu compte qu’il était un cran au-dessus des autres (…) C’est quelqu’un de discret, de très calme, qui aime les choses simples mais qui aime avant tout prendre soin de ses proches et surtout de sa famille. (…) Il n’a pas beaucoup changé. C’est toujours ce mec qui veut juste jouer au rugby. (…) En début de saison, il trainait une blessure mais il voulait quand même jouer,  même s’il avait mal ».